Abstracts

Colette Bémont : L’étude des lampes
Les lampes se définissent par leur usage, les matériaux qui les constituent (pierre, terre cuite, métal, verre, etc.), leurs caractères morphologiques (spécifiques ou non), leur intérêt archéologique, surtout dans le cas des plus fragiles et des plus nombreuses (argile). La plupart des études (menées principalement depuis le début du XXe siècle) sont liées à l’histoire de la Grèce et de ses colonies et à celle de Rome et de son empire (entre le VIe s. av. J.-C. et le VIIe s. ap. J.-C.) et couvrent la plus grande partie de l’Europe et ses confins, le nord de l’Afrique et le Proche Orient. Ces travaux, destinés entre autres à fournir des typologies de référence, se caractérisent par leur éparpillement historique et géographique (spécialisation des recherches archéologiques), la variété de leurs contenus et objectifs, leur incohérence (multiplication des classifications). Nous avons donc actuellement besoin de recherches complémentaires (avant et après la période classique), de coordination des travaux (création de l’ILA), d’inventaires bibliographiques (cf. L. Chrzanovski).
La France (cf. la Gaule/Germanie) a dépendu successivement (sur des zones plus ou moins larges) de régions créatives et exportatrices : principalement la Grèce, l’Italie, l’Afrique et aussi de productions locales. Or les publications françaises sont actuellement trop rares et disséminées.
Cependant de nombreuses perspectives sont ouvertes aux enquêtes :
1. état des fonds 2. ressources archéologiques : mobilier datant (types de référence, zones d’influence commerciale, etc.) ; développement d’ateliers gallo-romains (typochronologie, créativité, diffusion) 3. place des musées : mobiliers locaux (complémentaires des fouilles) ; fonds exotiques et leur histoire 4. méthodes d’étude : identification (typologique, physico-chimique) ; publication (problème des typologies, de la bibliographie) 5. histoire générale : techniques artisanales de fabrication, relations avec d’autres mobiliers, d’autres régions (iconographie, typologie, épigraphie) ; développement des modes d’éclairages (mobiliers concurrents, successifs, combustibles).


Jean Bussière (UMR 5140) : Les lampes de l’Auribelle-Basse (Hérault)
Cette étude concerne les lampes à huile exhumées par Stéphane Mauné et son équipe lors des fouilles programmées du site de l’Auribelle-Basse près de Pézenas (Hérault) au cours de quatre campagnes échelonnées entre juillet 2001 et juillet 2004. La majorité des luminaires, très fragmentés, ont été recueillis dans des fosses/dépotoirs et dans des remblais. Sur un total de 328 fragments il a été possible d’individualiser 307 lampes qui couvrent une phase chronologique de trois siècles et ont été trouvés sur une surface fouillée d’environ 5000 m2. En dehors de présenter les types attestés, leurs décors, et les marques d’ateliers présentes, l’étude s’efforce à partir des phases d’activité admises des ateliers de lucernaires de corroborer la chronologie assignée aux UR par les fouilleurs à partir des témoins autres que les lampes. Les quelques décalages chronologiques constatés sont imputables à un attardement des luminaires mis au rebut et ne sauraient remettre en question la chronologie des ateliers. Le nombre élevé de tessons de lampes recueillis sur une surface assez réduite a suscité des interrogations sur le statut et la fonction du site dont l’interprétation reste encore ouverte. Dans cette perspective l’étude apporte des éléments de comparaison avec les quantités de lampes recueillies sur quelques sites urbains en Narbonnaise et dans d’autres provinces.


Laurent Chrzanovski (Historisches Museum Olten) : Lychnologie gauloise : un état des recherches publiées.
Etrange bilan scientifique que celui de la lychnologie de France… pour le meilleur comme pour le pire, pourrait-on écrire avec une pointe d’ironie. En effet, l’Hexagone a su livrer des recherches aussi profondes que pionnières : parmi les premiers catalogues raisonnés d’Europe figurent ceux des musées d’Avignon et de Besançon ; la premier colloque international de notre science fut organisé à Lyon ; des corpus de collections (Bibliothèque Nationale de France) ou de sites (Glanum) font désormais partie des « classiques » de tout chercheur ès lampes. Mais de l’autre côté, quelle disette ! Quelques dizaines d’articles épars, de faible envergure, nous initient ci et là à des richesses inouies (doit-on encore nommer les 15’000 lampes du sanctuaire da Lachau ?) pour lesquelles, comme un supplice de Tantale, on attend encore une publication conséquente. Que faire ? La réponse se trouve dans cette salle, qui nous voit aujourd’hui réunis. Dresser un bilan sans concession, fédérer la recherche et surtout tracer des pistes pour ceux qui voudront les suivre, tel est en tout cas le souhait que nous nous devons de partager !


Laurent Chrzanovski (Historisches Museum Olten) : Aux frontières de la Gaule : le cas de Genava
Dernière bourgade de Narbonaise, Genava est située à un endroit hautement stratégique : elle contrôle le dernier passage sur le Rhône avant le Léman (le fameux pont détruit par César !), gère le transbordement des marchandises du trafic Nord-Sud (ce même Rhône n’est pas navigable entre Genava et Condate – Seyssel), ponctionne le quarantième des Gaules (de l’autre côté, c’est déjà la Germanie !).
Vicus modeste vivant avant tout de son port, mais entouré de villas de luxe, dont celle du gouverneur de la Narbonnaise Fronto, Genava ne va cesser de croître durant les siècles de l’Empire, finissant par phagociter littéralement sa voisine, l’illustre Colonia Iulia Equestris (Nyon), dont les blocs des monuments publics serviront à édifier les puissants remparts de la Genève tardo-antique, devenue puissante cité et siège épiscopal.
Le panorama lychnologique est aussi surprenant que l’histoire du site : à des contextes – même urbains – dépourvus de tout luminaire romanisé, que l’on suppose restés attachés à l’éclairage traditionnel au bois et au suif, succèdent des ensembles au prestige rarement atteint dans la région : lampes italiennes et gauloises de la meilleure qualité, en nombre, puis lampes africaines tardives.


Raffaella Gafà-Piskorz (Musée archéologique de Nîmes, agent du patrimoine) : Les lampes du chantier des Carmes à Nîmes (Gard).
La ZAC du Forum des Carmes est située en périphérie de l’agglomération antique, à 100 m à l’est de la Porte d’Auguste. La fouille préventive réalisée en 1997 par une équipe Afan (désormais INRAP) et dirigée par Valérie Bel a permis de suivre l’évolution du site entre le IIe s. av. J.-C et le courant du IIe s. ap. J.-C. jusqu’aux époques médiévale et moderne.
Les 200 fragments de lampes à huile issus de ce chantier nîmois illustrent l’évolution quantitative et typologique de cette classe de mobilier sur une fourchette chronologique d’environ quatre siècles. Cet ensemble représente un élément en plus dans la connaissance sur le luminaire dans l’agglomération nîmoise.


Laurent Guyard (Mission archéologique départementale de l’Eure), Florence Carré (SRA de Haute-Normandie), Yves-Marie Adrian (INRAP), Hubert Lepaumier (INRAP), Petit éclairage sur le luminaire des Aulerques Eburovices (Eure, France)
Un bref examen des collections de deux musées régionaux (Evreux et Louviers) et des découvertes récentes apporte des éléments à la connaissance du luminaire utilisé dans la cité des Aulerques Eburovices. L’échantillon est cependant particulièrement faible, avec une vingtaine de lampes en terre cuite et huit en alliage cuivreux. En revanche, il s’avère intéressant en raison de la diversité des sites et des contextes dont proviennent les objets (chef-lieu de cité, agglomérations secondaires, sanctuaires, nécropoles, habitats ruraux, atelier de production céramique). Les types sont également variés.
Les lampes à huile en terre cuite moulée sont attestées au moins dès la période augustéenne, essentiellement en contexte urbain. Il faut signaler l’exceptionnelle découverte d’une lampe de type Dressel 2 dans un habitat rural de la fin de l’Age du Fer, à Guichainville, près d’Evreux. Les lampes des Ier et IIe s. sont représentées en milieu rural et urbain, en habitat comme en nécropole. L’objet apparaît rare mais il n’est pas réservé à l’unique usage funéraire. Les types de lampes sont ceux qui sont les plus répandus en Gaule (Loeschke I et IV, Firmalampen) ; les décors sortent parfois de l’ordinaire comme celui d’une lampe de Brionne (divinité surmontée d’une étagère).
Comme dans d’autres régions de Gaule du nord (voire d’ailleurs plus au sud, comme en Bourgogne), le luminaire à huile est complété par des lampes ouvertes brûlant un combustible solide. Les deux exemplaires datés appartiennent au IIe s. Deux types sont représentés : les lampes à douille et les simples godets à anse et bec pincé. Ces derniers semblent courants aussi bien en ville qu’à la campagne. La fabrication locale d’une partie d’entre eux est démontrée par la découverte d’un exemplaire sur un atelier de céramique commune du IIe s., près d’Evreux. Ces lampes sont elles aussi présentes dans des contextes variés (nécropole, sanctuaire, atelier).
A côté de ces types connus, un luminaire plus rudimentaire a été mis en évidence. Il est constitué de poteries brisées et récupérées, principalement des fonds de cruches, plus rarement de gobelets à dépressions (2 ex.). Il est en majorité attribué à la seconde moitié du IIe et surtout au IIIe s., période où les lampes moulées semblent faire défaut dans la région. Bien identifiés dans les fouilles récentes de la ville sanctuaire du Vieil-Evreux où au moins une dizaine de cas sont connus, ces fonds de vases sont également attestés dans la nécropole urbaine d’Evreux et la villa de Gisay-la-Coudre.
Le luminaire en alliage cuivreux ne provient pas exclusivement des villes. Les lampes à huile appartiennent à des types courants. Plus rare, une lampe à suif provient du Vieil-Evreux. Des chandeliers à deux branches attestent enfin d’un autre type d’éclairage, à la chandelle.
Aucune lampe (en particulier africaine) n’est connue pour les IVe et Ve s., en dépit de plusieurs fouilles de grande envergure réalisées récemment.


Alice Hanotte : Regards sur l’éclairage gallo-romain en Gaule Belgique d’après l’étude des luminaires du musée/site archéologique de Bavay.
Le musée/site archéologique de Bavay (Nord) conserve dans ses collections une soixantaine de lampes, bougeoirs et candélabres gallo-romains en terre cuite et en bronze. D’autres luminaires, retrouvés également à Bavay, sont conservés dans d’autres collections publiques : au Musée des Beaux Arts de Lille, au Musée de la société archéologique d’Avesnes-sur-Helpe, au Musée des Beaux Arts de Valenciennes, au Musée archéologique de Douai et au Musée royal de Mariemont (Belgique). Un premier inventaire des lampes en terre cuite a été publié par J-C Carmelez, ancien conservateur du musée, dans la revue locale Fouilles Etudes Archeologie et Pédagogie en 1984. La table-ronde de l’Ila constitue aujourd’hui l’occasion de faire une synthèse sur le luminaire de Bavay, en présentant un corpus relativement inédit ayant fait l’objet de publications disparates.
Les lampes retrouvées à Bavay constituent un échantillon quantitativement faible mais présentent une extraordinaire diversité. On distinguera les lampes ouvertes et bougeoirs en terre cuite des lampes de tradition méditerranéenne issues d’importations ou d’imitations locales. Les lampes ouvertes, de tradition locale, étaient vraisemblablement destinées à la combustion de suif, d’encens ou de résines parfumées. Les résultats d’une tentative d’archéologie expérimentale viendront apporter des éléments techniques et confirmer certaines hypothèses sur la fabrication de ces lampes. Les lampes de tradition méditerranéenne sont composées en majorité de Firmalampen dont la plupart sont des imitations miniatures ou « veilleuses ». Plusieurs signatures connues sont attestées, on citera notamment les suivantes : FORTIS, EVCARPI, ATTIMETI, SATTON(S). Par ailleurs, quelques éléments rares ou atypiques se distinguent : notamment un fragment de lampe plastique en pomme de pain (probablement importée), une petite lampe et son moule ornés d’une rouelle (de Taranis ?) attestant d’une fabrication locale ponctuelle et plusieurs lampes de Firme recoupées en leur centre, probablement dans le but d’y faire brûler un combustible solide, et donc plus accessible que l’huile. Parallèlement aux luminaires courants en terre cuite, la richesse de la collection lychnologique de Bavay est sans conteste illustrée par les lampes, candélabres et bougeoirs en bronze. La plupart de ces éléments sont issus du fameux « Trésor des Bronzes », découverte exceptionnelle d’un dépôt métallique de plus de 300 pièces, exhumé en 1969, à l’angle nord-est de la basilique du Forum romain. Ces luminaires se distinguent par leur originalité iconographique et le soin de leur facture. En témoignent une lampe plastique en bronze au visage d’Eros, des fûts de candélabre végétalistes, deux lampes à volutes en bronze dont une à chaînette, un bougeoir figurant Eros sur un dauphin ou encore d’autres brûle-parfums très stylisés. Les luminaires de Bavay sont pour la plupart issus de fouilles anciennes du XXème siècle, exceptées quelques lampes ouvertes et des lampes de Firme issues de sépultures du IIème siècle ap. J-C de la nécropole fouillée en 1994-1995 par le Service Archéologique Départemental lors de la construction de la RN 49. Les éléments anciens dont le contexte archéologique a pu être authentifié appartiennent essentiellement à un contexte funéraire. En effet, ce sont dans les sablières situées au sud-ouest de la cité antique et dont l’exploitation a livré 520 structures correspondant à des sépultures à incinération ou inhumations, puits et caves funéraires que ces lampes ont été déposées. Le rituel de la lampe est un phénomène courant dans les sépultures des régions septentrionales et témoigne de l’adoption d’un rite de tradition méditerranéenne et romaine au Nord de la Gaule. On croit aux vertus apothropaïques de la lumière pour accompagner le défunt non seulement lors des processions mortuaires mais aussi jusque dans sa dernière demeure.


Françoise Labaune-Jean, INRAP Bretagne : Le luminaire de Rennes (Ille-et-Vilaine, France)
Dans l’état actuel des découvertes, l’Ouest de la Gaule est pauvre en luminaire. Le cas de Rennes – Condate (chef lieu du territoire des Riedones) ne fait pas exception. Le luminaire mis au jour présente des caractéristiques locales fortes : un état très fragmentaire, la présence anecdotique des lampes à huile dans les contextes les plus anciens et l’usage de bougeoirs à partir de la seconde moitié du IIe siècle après J.-C. Cette faible représentation n’empêche pas la présence d’éléments intéressants. Nous proposons donc de faire un inventaire des 19 lampes, des exemplaires complets de bougeoirs (17 NMI), auxquels s’ajoutent un fragment de lustre ( ?) et un brûleur de lanterne en bronze. On peut s’étonner de la rareté du luminaire dans les habitations antiques locales. L’architecture en terre et bois largement généralisée rend l’éclairage artificiel nécessaire. L’utilisation probable de combustibles périssables, type torche, peut expliquer, en partie, cette absence.


Marie-France Meylan Krause : Lampes helvètes : production et diffusion. Un état de la question.
En territoire helvète, la recherche sur les lampes romaines avait été lancée de manière décisive et pionnière en 1919 par Siegfried Loeschcke avec son ouvrage sur les lampes de Vindonissa. Près de 60 ans plus tard, Annalies Leibundgut reprenait la question en élargissant son étude à l’ensemble des lampes de Suisse d’époque impériale. Ces dix dernières années, quelques études ponctuelles ont permis de faire le point sur les productions de lampes helvètes et leur diffusion et de corriger quelque peu certaines hypothèses formulées par A. Leibundgut. Les principaux ateliers provinciaux ayant exporté leur produit en Helvétie seront également évoqués.


Alain Marignan : Les lampes à huile du Musée d’Archéologie Méditerranéenne à Marseille.
Au Musée de la Vieille Charité, la collection de lampes s’étend sur une longue période et les catégories principales sont représentées. Ainsi, elle peut être abordée sur un plan statistique et épistémologique. Elle a par ailleurs un grand intérêt pédagogique. Ce sont surtout les productions de la partie occidentale de la Méditerranée qui sont représentées. Si le lieu de trouvaille est le plus souvent inconnu, la prépondérance demeure loco-régionale avec en particulier Arles, ainsi que Marseille et son aire d’influence. A côté des dons et des achats, les trouvailles sont fortuites, à l’occasion de travaux de voirie en particulier, dans un contexte de fouilles pauvres et dont les notes ne nous sont pas parvenues. Sur 216 pièces répertoriées par Froehner en 1883, 169 sont actuellement présentes, dont un moule et quatre lampes douteuses. Les lampes moulées sont dominantes par rapport aux lampes tournées.


Jean-Louis Podvin (Université du Littoral-Côte d’Opale, Boulogne-sur-Mer) : LAMPES ISIAQUES RETROUVEES EN FRANCE
Lors du premier congrès sur le luminaire antique tenu à Nyon et Genève en 2003, nous avons eu l’occasion d’aborder les lampes décorées du motif d’Anubis seul dans le monde romain. Nous avions déjà précédemment travaillé sur le motif d’Anubis et Isis se retournant, et avons depuis repris le décor de la triade Harpocrate, Isis, Anubis. Après un inventaire des lampes isiaques retrouvées en Espagne et au Portugal, il a semblé intéressant, dans le cadre de cette Table Ronde, de dresser un bilan des lampes ornées de thèmes isiaques dans l’espace géographique de la Gaule. Comme toute recherche de ce type, la difficulté réside dans l’éparpillement géographique du matériel et des publications afférentes. Il ne nous a ainsi pas été possible de voir toutes les lampes que nous mentionnons. Isis allaitant Harpocrate est présente sur des anses plastiques de divers types (Vichy, Narbonne, Le Grau du Roy, Nîmes). Elle peut être seule sur une anse delta (Marseille) ; en compagnie d’Anubis et Harpocrate sur des exemplaires italiens ou copiés (Tarquimpol, Montans, Toulouse, Fos) ; de Sérapis radié sur d’autres, africains (Marseille, Mont Avrelot, Vichy) ; d’Anubis sur un modèle africain (Marseille) ; d’Harpocrate sur un exemplaire exceptionnel de Corse. Sérapis peut être en buste seul (Amiens), ou sous la forme d’Agathodaimon (Toulouse), et il est même embrassé par Hélios dans un exemple de Charente. Harpocrate semble être concentré géographiquement dans la Vallée du Rhône (Orange, Cavaillon, Vaison-la-Romaine, Saint-Paul-Trois-Châteaux). Quant à Anubis seul, il est attesté à Lurs et à Fos. A la différence d’autres espaces géographiques (Italie, Espagne, Afrique, Grèce), la Gaule n’a donc pas été un espace de création de nouveaux modèles de lampes à décors isiaques.


Christophe Renaud, François Rousselle (Laboratoire d’Informatique du Littoral) : Introduction aux problématiques de simulation d’éclairage pour des applications archéologiques
Les techniques et outils issus du domaine de la synthèse d’images tendent depuis plusieurs années à se diffuser auprès des chercheurs en archéologie et de nombreux projets de recherche se font désormais en étroite collaboration entre informaticiens et archéologues. En parallèle à ces travaux de recherche on trouve également de nombreuses réalisations à destination du grand public. L’objectif est alors d’offrir aux visiteurs d’un site ou d’un musée, ou encore aux spectateurs d’un programme télévisé, un aperçu aussi fidèle que possible de reconstitutions de sites, monuments ou objets, ou encore de périodes de l’histoire humaine.
Quelle que soit l’application visée, un souci majeur réside désormais dans le réalisme des images présentées aux utilisateurs finaux. Outre les aspects liés à la véracité scientifique, cette notion de réalisme recouvre en fait de nombreuses propriétés que doit vérifier l’environnement virtuel reconstitué : qualité de la reconstruction géométrique des objets et architectures, complexité des détails, réalisme des animations, qualité de l’éclairage etc.
Nous nous intéresserons ici plus particulièrement aux aspects liés à l’éclairage et à leurs effets sur la qualité des images obtenues. En effet, comme dans le monde réel, sans source de lumière, aucune image ne peut être obtenue ! Et comme dans la réalité physique, la couleur perçue par un observateur humain résulte de la conjonction de trois phénomènes complémentaires : • l’émission de photons par une source de lumière, ces photons étant caractérisés par une distribution spectrale (une couleur) caractéristique de la source ; • la réflexion (voire d’autres phénomènes plus complexes) de ces photons sur les objets, avec, en général, une modification de leur distribution spectrale due aux propriétés du matériau dont est composé l’objet considéré ; • l’arrivée de ces photons sur le capteur que représente notre rétine et leur interprétation sous forme de couleur.
Ces phénomènes physiques et physiologiques conduisent à des modèles souvent relativement complexes et leur transposition dans un outil informatique va bien souvent devoir se plier au type d’application qui est visé. Si l’objectif est de disposer d’une application interactive, à l’image du projet CyberForum du Musée Départemental d’Archéologie de Bavay, ces différents phénomènes devront être simplifiés et leurs effets pré calculés, afin d’être affichables en un temps très court. A l’inverse, lorsque la contrainte de temps est moins forte, par exemple dans le cadre de la production d’un film non interactif, il devient possible d’effectuer des simulations de ces phénomènes, en réduisant au maximum les simplifications apportées.
Notons que cette séparation entre approximation et simulation n’existe que du fait des limites actuelles de la technologie informatique. Elle perdurera vraisemblablement pendant encore quelques années, le temps pour cette technologie de fournir des matériels informatiques suffisamment puissants pour permettre une simulation précise et rapide des phénomènes complexes qui se produisent dans la réalité.
Que l’on se place dans le cadre de la simulation ou de l’approximation, les calculs d’éclairage dans le cadre d’une reconstitution archéologique posent de réels problèmes de recherche, dès lors que le mot-clé qui sous-tend ces recherches est réalisme.
Du point de vue des sources tout d’abord. En effet, pendant des milliers d’années et jusqu’à très récemment, la principale source d’éclairage non naturelle était obtenue par des flammes : flammes d’un foyer, d’une lampe à huile, d’une bougie, etc. Contrairement aux sources d’éclairage modernes, qui se caractérisent par une intensité et une couleur constantes au cours du temps, les flammes présentent des éléments dynamiques souvent complexes à simuler et même parfois difficiles à appréhender. La couleur d’une flamme et de l’éclairage qu’elle génère dépend ainsi des réactions chimiques qui se produisent en son sein et, par voie de conséquence, de la composition chimique de son carburant [Devlin01]. La capture de la distribution spectrale de telle ou telle flamme reste possible, mais leur simulation à partir des propriétés du carburant reste à explorer. La dynamique de la flamme, quant à elle, peut être simulée par l’intermédiaire de modèles de dynamique des fluides, mais ces modèles sont coûteux en temps de calcul et leur utilisation au sein d’applications interactives fait l’objet d’études très précises [Stam03][Bridault06a] qui montrent leur intérêt et leurs limites actuelles. La restitution de la flamme proprement dite et de ses effets sur l’environnement pose également de nombreux challenges, plus particulièrement dans un contexte interactif. Il faut en effet modéliser une forme de flamme qui apparaisse plausible, animer cette forme de manière convaincante et calculer l’impact de cette flamme sur l’environnement en terme d’éclairage, tout cela en quelques dizaines de millisecondes … [Bridault06b] Un effet supplémentaire de l’éclairage par des flammes, peu étudié à ce jour, concerne la production et la dispersion des résidus de combustion. Il est ainsi nécessaire de simuler les processus responsables de la production de fumées pour déterminer leur présence et leur densité, mais également de connaître les caractéristiques physiques de l’environnement afin de déterminer les possibilités de dispersion ou de stagnation de ces fumées.
Le rendu réaliste des objets virtuels apparaissant dans un environnement requiert également une modélisation précise des propriétés des matériaux utilisés pour leur fabrication. Comme pour les flammes, il est possible de capturer les caractéristiques de ces matériaux au travers de mesures de réflexion spectrale ou de l’analyse de micro prélèvements [Genty06]. Mais l’utilisation des informations obtenues reste complexe dès lors que l’on souhaite effectuer une simulation précise de l’interaction entre la lumière et le matériau. Les applications interactives effectuent alors des approximations importantes qui peuvent nuire à la qualité de la restitution, en particulier si elle doit être utilisée dans un but scientifique.
Enfin, dernier maillon de la chaîne de simulation : le périphérique de restitution, qui est supposé présenter à l’utilisateur final une vue réaliste de ce qui a été simulé. Malheureusement, les périphériques de restitution actuels tels que les écrans, les imprimantes ou encore les vidéo projecteurs présentent deux défauts majeurs : d’une part, l’intervalle de luminosité qu’ils sont capables de restituer est, de loin inférieur à ce que l’oeil humain est capable de percevoir ; d’autre part, les facultés de restitution diffèrent entre périphériques et, également, entre matériel de même type. Ainsi, une image calculée de manière précise sera restituée différemment sur un écran d’ordinateur et sur un écran de projection. Se pose alors la question de la réalité de l’impression visuelle reçue par l’observateur et, en corollaire, la recherche de méthodes de correction de tons susceptibles de pallier ces problèmes.
Ces trois aspects sont fondamentaux dans tout calcul d’éclairage qui vise à fournir des images réalistes. Leur prise en compte au sein d’outil de simulation de l’éclairage génère cependant des temps de calcul de l’ordre de plusieurs heures par image, ce qui les rend, à l’heure actuelle, incompatibles avec des applications interactives. Dès lors que ce type d’application est requis, il est nécessaire d’effectuer de nombreuses simplifications, la plus courante étant d’effectuer un pré calcul de l’illumination et de le considérer ensuite comme statique durant toute la durée de la session interactive. Cette approximation, si elle est valable à la lumière du jour ou avec nos sources d’éclairage modernes, est cependant non pertinente dans le cadre de sources de type flamme. Ces dernières génèrent en effet des effets dynamiques très importants sur l’illumination de l’environnement, effets que tout observateur s’attend à percevoir dès lors que des flammes sont présentes. Ceci justifie le travail actuellement en cours dans notre laboratoire [Bridault06b] et visant à l’amélioration du rendu du forum Gallo-Romain de Bavay, dans le cadre du projet Cyberforum.
Références : [Bridault06a] BRIDAULT-LOUCHEZ F., LEBLOND M., ROUSSELLE F., RENAUD C. : Enhanced illumination of reconstructed dynamic environments using a real-time flame model. In Afrigraph 06 : Proceedings of the 4th international conference on Computer graphics, virtual reality, visualisation and interaction in Africa (New York, NY, USA, 2006), ACM Press, pp. 31-40
[Bridault06b] BRIDAULT-LOUCHEZ F., ROUSSELLE F., RENAUD C., LEBLOND M. : Real-time Animation of Various Flame Shapes, The 7th International Symposium on Virtual Reality, Archaeology and Cultural Heritage, VAST (2006)
[Devlin01]DEVLIN K., CHALMERS A. : Realistic visualisation of the pompeii frescoes. In Proceedings of the 1st international conference on Computer graphics, virtual reality and visualisation (2001), ACM Press, pp. 43-48
[Genty06] GENTY A, CALLET P., LEQUEMENT R, DECONTENCIN F-X, ZYMLA A., BONNET B. : Cultural Heritage Engineering – Measured, Calculated and Computed Color, The 7th International Symposium on Virtual Reality, Archaeology and Cultural Heritage, VAST (2006)
[Stam03] STAM J. : Real-time fluid dynamics for games. In Proceedings of the Game Developer Conference (2003)


Daniela Ugolini (Chargée de Recherche au CNRS, Centre Camille Jullian, UMR 6573, Aix-en-Provence) : Les lampes grecques du Languedoc-Roussillon antérieures au IIIe s. av. J.-C.
La lampe à huile n’est pas courante en Gaule méditerranéenne, en dehors de quelques sites plus ou moins liés au monde grec, avant l’arrivée des produits italiques au IIIe et surtout II-Ier s. av. J.-C. À l’Est du Rhône, hormis Marseille, on ne rencontre que des exemplaires isolés sur des sites qui jalonnent les côtes provençale et varoise, alors que la région occidentale constitue une intéressante zone d’étude dans la mesure où la diffusion a été plus importante et a touché notamment les sites de l’Hérault occidental et de l’Aude. On compte environ 150 lampes arrivées entre -550/-525 et -300/-275. En majorité à vernis noir importées d’Athènes, d’autres lampes sont en pâte claire (“ioniennes” ou produites dans le monde grec d’Occident), en grise monochrome, en céramique de cuisine tournée et même en céramique non tournée. D’après la documentation actuellement disponible, les sites où l’on peut supposer un emploi régulier de la lampe à huile (pendant toute la période ou à un moment donné) sont en fait des cas isolés et la chronologie des apports permet de saisir que la lampe à huile a connu, en Languedoc-Roussillon, une distribution plus capillaire entre -550 et -475 que par la suite.


Alain Vernhet (CNRS) : Lampes gallo-romaines de la région de Millau (Aveyron)
La région de Millau a livré des centaines de lampes à huile gallo-romaines, pour la plupart en terre cuite, rarement en bronze ou en fer. Ces lampes, datables entre le 1er s. avant et le IVe s. après J.-C., sont d’origine italique, sud-gauloise ou africaine. On les retrouve dans des habitats, des sanctuaires, des sépultures, des grottes ou des mines. Aucun exemplaire ne semble avoir été fabriqué dans les ateliers de potiers de La Graufesenque, mais beaucoup de motifs surmoulés de ces lampes figurent dans les décors des céramiques sigillées locales.


Laurent Wilmet (FUNDP – Namur) :Les luminaires romains en Belgique : état de la question et essai de typologie.
État de la question
Les publications dédiées aux luminaires de la période romaine découverts sur le territoire de l’actuelle Belgique sont rares : elles se limitent, à notre connaissance, à quelques articles et à un mémoire de fin d’études malheureusement inédit. Cette quasi-absence de littérature spécialisée ne reflète toutefois ni l’intérêt du matériel lychnologique conservé dans les musées, ni la fréquence des découvertes. Des objets en relation avec l’éclairage, généralement des lampes ou des chandeliers, sont régulièrement cités et illustrés, plus rarement décrits ou étudiés, dans des articles et ouvrages qui ne leur sont pas spécifiquement consacrés tels que des rapports de fouilles et des catalogues d’exposition.
Essai de typologie
Les lampes en terre cuite découvertes en Belgique appartiennent, pour l’essentiel, à quatre grandes catégories typologiques : les lampes à canal (Firmalampen), les lampes à volutes, les lampes à bec arrondi du type Loeschcke VIII et les lampes ouvertes du type Loeschcke XI (Achtförmige Lampen). À ces quatre groupes principaux, il convient d’adjoindre des types que nous pouvons qualifier de mineurs car ils ne rassemblent, au mieux, que quelques objets. Les lampes en métal (bronze ou fer) montrent, à l’instar des luminaires en terre cuite, une certaine diversité typologique. Les types XX, XXI, XXII et XXV de Loeschcke sont notamment représentés au sein de notre corpus.Outre les lampes en terre cuite et en métal, les sites belges d’époque romaine ont livré d’autres objets en relation avec l’éclairage. Il s’agit, le plus souvent, de petits chandeliers en bronze de types divers. Une lanterne est également attestée.

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